torsdag 28 juni 2018

"La Perruche noire" de Lars Sjunnesson (L’Association) : un oiseau mazouté dans un monde azimuté

Climato-sceptiques, passez votre chemin ! Pour Lars Sjunnesson, les conséquences du réchauffement climatique sont déjà là. Mais "La Perruche noire" n'a rien du pamphlet écologiste ni du brûlot catastrophiste. Ce livre dépeint simplement, avec humour mais sans illusion, l'absurdité dans laquelle nous nous enferrons...
Le monde va mal ! Il ne tourne pas rond, et nous n’y sommes pas pour rien... Réchauffement climatique, pollutions diverses, paranoïa généralisée et agressivité débridée nous empoisonnent, comme ils envahissent La Perruche noire, petit livre du Suédois Lars Sjunnesson édité par L’Association [1].

Le dessinateur, qui est édité par L’Association depuis la fin des années 1990 [2], peut paraître moins radical dans La Perruche noire que dans Åke Ordür (2013). S’il se fait moins brutal dans sa présentation du monde et s’il malmène - un peu - moins ses personnages, sa vision demeure bien sombre.

Aussi absurde et inquiétant que notre univers, celui de Lars Sjunnesson est quand même un peu plus drôle. Les réactions et réflexions de ses personnages sont inattendues et les situations pour le moins étonnantes. Au fil de six chapitres construits comme autant de séquences, La Perruche noire déconcerte par son ambiance et charme par sa fantaisie. Bien des éléments y sont effrayants, mais l’auteur place toujours une pointe d’humour ou de non-sens qui permet de faire oublier, un court instant, le pessimisme de l’ensemble.

Les personnages de La Perruche noire - le fameux oiseau serait en fait un moineau peinturluré - se croisent et dialoguent sans vraiment échanger. Chacun poursuit un objectif, précis et inutile. La vacuité emplit tout. Les menaces, aussi, planent, mais il existe toujours un manuel pour y faire face. Tout va bien... Comme lors d’une chute : le plus dur est à l’arrivée.

Un peu surréaliste, un peu minimaliste, Lars Sjunnesson est surtout très ironique et un brin poète. Il entame chacun de ses chapitres par la présentation d’une sorte de lexique graphique : de petites figures, qui forment comme autant de signes voire de symboles que nous retrouvons ensuite au fil des pages. Chacun a la clé de son avenir, semble-t-il nous dire. Nous disposons d’un certain nombre d’éléments : à nous de les assembler, pour le meilleur comme pour le pire.

Outre le ton du récit, le trait épais, la raideur des personnages et la géométrie des décors, qui acquièrent ainsi une dimension universelle, renvoient à une conclusion sans appel : inutile de se voiler la face, nous provoquons notre propre perte. Et la moindre des politesse est d’en rire, avec une pointe de malice bien que sans méchanceté.

(par Frédéric HOJLO)

[1] Publié en Suède en 2016 dans sa version originale, quelques chapitres ont cependant déjà été édités par The Hoochie Coochie entre 2013 et 2016, dans la revue Turkey Comix.

[2] Comix 2000 en 1999, la revue Lapin entre 2002 et 2011 ou encore Bosnian Flat Dog avec Max Andersson en 2005.


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